Il s’appelle Ata Ullah — comme un célèbre chanteur pakistanais —, il est le leader de l’insurrection armée des Rohingyas musulmans et il est loin de faire l’unanimité dans son propre camp.

«Héros ou fléau pour son peuple?» se demande prudemment [Le Point]( en relayant les interrogations que suscite ce «Che Guevara» islamiste surgi comme de nulle part. «Amateur malavisé» — le plus audacieux jugement que se permet le magazine — paraît pourtant de la camomille au regard de la biographie, pourtant très éloquente, du personnage.

«Ullah toutefois a connu un sort différent [de la grande majorité des Rohingyas]: né à Karachi au Pakistan, il a grandi dans une famille de la classe moyenne.

Son père a étudié dans la prestigieuse madrasa Darul-Uloom avant de partir enseigner en Arabie saoudite, à Ryad, puis Taif, selon un proche.

Le jeune Ullah y a appris à réciter le coran. Il a été repéré par de riches Saoudiens qui l'ont recruté pour l'enseigner à leurs enfants. Il a rapidement été admis dans leur cercle intime, participant à de somptueuses fêtes et parties de chasse.

“Les Saoudiens l'aimaient beaucoup et le traitaient comme l'un des leurs", relate un proche de Ullah.

Ullah abandonna cette vie confortable après des émeutes en Etat Rakhine en 2012, qui provoquèrent le déplacement de plus de 140.000 personnes, pour la plupart rohingyas. Il quitta l'Arabie pour se battre en Birmanie.»

Bref: un jeune Pakistanais de la classe moyenne, émigré en Arabie avec son père docteur de la foi, abandonne soudain sa vie de plaisirs et de parties de chasse pour aller mener la guérilla dans un pays du sud-est asiatique qui n'est même pas le sien...

Il faut être aveugle comme un journaliste de grand chemin pour ne pas remarquer les bizarreries de cette biographie – ni leur ressemblance criante avec celle d’un illustre prédécesseur. Le nouveau Ben Laden est en selle, formé de longue date par l’argent et le fanatisme saoudiens, et infiltré sur le terrain au début même de la campagne de propagande anglo-saxonne en faveur de la «minorité la plus opprimée au monde».

Nos brillants analystes, bien évidemment, n’y ont vu qu'un joli conte de fées.

Seule perle dans l'article de l'AFP, mais il faut bien ouvrir l'oeil pour la repêcher:

«Ata Ullah est le visage le plus connu de l'armée du salut des Rohingyas de l'Arakan (ARSA), un mouvement rebelle qui a attaqué des dizaines de poste-frontières birmans, déclenchant une répression de l'armée qui a poussé quelque 420.000 Rohingyas à fuir vers le Bangladesh.»

En d'autres termes: l'hostilité de l'Etat et de la majorité bouddhiste n'est pas seulement une affaire d'islamophobie. Elle est le résultat d'une campagne de provocation délibérément menée par une guérilla islamique avec à sa tête un agent saoudien.

Merci à l'AFP pour cette très utile bévue!