DEBAT U.S. | La RSR vend ses rêves pour de l’information
Au lendemain du deuxième débat Trump-Clinton, la Radio suisse romande invitait au journal de midi Nicole Bacharan, «professeur à Sciences-Po» (c’était dit), mais aussi membre du Cercle de l’Oratoire, le lobby néoconservateur français (c’était tu) et auteur de nombre d’essais lourdement élogieux vis-à-vis de l’empire U.S., dont Vive l’atlantisme! et l’immortel Pourquoi nous avons besoin des Américains qui «atteint tout à la fois les sommets du ridicule et les tréfonds de l’inanité») dans la servilité atlantique (ceci aussi était tu).
Bref, le genre d’«expert» totalement impartial et dégagé de tout conflit d’intérêts dont la radio suisse aime se servir pour donner une représentation «objective» des affaires du monde…
A la question de savoir «Qui a gagné le débat?», qu’a répondu, selon vous, le professeur Bacharan? Comme de bien entendu, « très largement Hillary Clinton»! Mais d’après des sondages auprès d’«échantillons de téléspectateurs… limités», parce qu’«on n’a pas de sondages plus larges…».
Ah bon? On aurait pu attendre de les avoir, les sondages plus larges, plutôt que d’enfumer les auditeurs avec des fausses «bonnes» nouvelles.
Le même jour en effet, le site dreuz.info publiait un inventaire sourcé de ces sondages «qu’on n’a pas» auprès du grand public américain. C’était édifiant. Sur 33 sources, seules 4, parmi les moins représentatives donnent une avance plutôt serrée à Hillary Clinton! Partout ailleurs, la victoire de Trump apparaît écrasante.
Evidemment, même s’il ne fait que citer des chiffres, dreuz.info n’est pas une source fréquentable, puisqu’il se présente ouvertement comme un site américain conservateur, chrétien et pro-israélien.
Le «professeur» invité par la RSR n’était pas moins impliqué, mais dans le camp du «bien», du progrès et de l’empire. La rédaction n’a pas hésité à l’inviter, malgré sa fonction de porte-voix français du système expansionniste et belliqueux dont Hillary est la candidate. Elle a simplement pris soin de passer sous silence cette partie de son CV. Elle ne nous a pas informés sur l’issue du débat, mais sur ce qu’elle aurait rêvé qu’elle fût...
Que les journalistes suisses s’auto-illusionnent sur la réalité du monde, passe encore: cela ne date pas d’hier. Mais que la radio nationale veuille imposer des visions systématiquement biaisées, camouflées en information, à l’ensemble des contribuables, ne nous semble pas faire partie de la mission d’un service public.
October 11th, 2016