C’est ce qui s’appelle une rétractation en grande pompe! Après avoir publié le jeudi 22 juin une enquête sur les influences russes dans l’entourage du président Trump, la chaîne d'information a rétracté son article dès le lendemain, vendredi 23, et effacé tous les liens concernés.

L’enquête en question, ne se fondant que sur une seule source anonyme, prétendait établir des liens entre un fonds d’investissement russe et un conseiller du président Trump, Anthony Scaramucci. Incapable d’étayer ses affirmations, la chaîne a présenté des excuses au concerné.

Dans la foulée, les trois journalistes responsables ont présenté leur démission. Et l’on ne saurait parler de stagiaires inexpérimentés. Il s’agit de Thomas Frank, le rédacteur du papier, d’Eric Lichtblau, lauréat du Prix Pulitzer, récemment débauché du New York Times, et de Lex Haris, chef d’une toute nouvelle unité d’investigation. Selon la chaîne, les «processus éditoriaux standard n’avaient pas été respectés» lors de la publication de cet article.

En privé, les collaborateurs de CNN sont beaucoup plus explicites. Capturé en caméra cachée, le producteur John Bonfield admet que les attaques répétées de la chaîne sur les liens russes de Trump gonflent l’audimat mais ne reposent sur aucune preuve, qu’il s’agit de «bullshit» et que le président a raison de dénoncer une chasse aux sorcières.

Il ne s’agit donc pas d’un dérapage occasionnel, mais d’un système de harcèlement

démagogique fondé, entre autres, sur l’exploitation et l’aggravation de la russophobie

. Comme le souligne Glenn Greenwald dans The Intercept, cette nouvelle affaire est compromettante pour CNN à plus d’un titre. D’abord, parce que le lièvre a été levé par Sputnik, l’«organe de propagande» russe, ainsi que par [Breitbart](

http://www.breitbart.com/big-government/2017/06/23/very-fake-news-cnn-pushes-refurbished-russia-conspiracy-inaccurately-claims-investment-fund-under-investigation/
)
qui ont mis en évidence d’incontestables erreurs de faits dans l’enquête.

Ensuite parce que l’affaire suit de près une autre rétractation de CNN sur le même dossier au sujet du témoignage de James Comey, l’ex-directeur du FBI, qui devait être compromettant pour le président Trump et qui ne le fut pas. Un détail que les autres médias de grand chemin se sont également efforcés de minimiser.

Car le problème s’étend bien au-delà des partis pris d’une rédaction particulière. Comme le souligne Greenwald:

[«Mais CNN n’est de loin pas seule pour ce qui est des rétractations embarrassantes au sujet de la Russie. Les grands médias U. S. ont continuellement diffusé des allégations au sujet de la Menace Russe qui se sont avérées totalement fausses — et toujours dans le sens d’une exagération de la menace et/ou de l’invention de liens incriminants entre Moscou et l’entourage de Trump. Dans pratiquement tous les cas, ces histoires comportaient des assertions dénuées de preuves venant de sources anonymes que ces médias relayaient comme des faits sans recul critique, avant qu’on découvre qu’elles étaient complètement fausses.»](

https://theintercept.com/2017/06/27/cnn-journalists-resign-latest-example-of-media-recklessness-on-the-russia-threat/
)

L’article de The Intercept abonde d’exemples de rétractations foireuses puisés dans des sources de premier plan comme le Washington Post, MSNBC, C-SPAN, Slate ou The Guardian. Leur statut établi de fabriques de fake news n’ôte rien à l’arrogance de ces médias à l’égard de l’information alternative. Il ne change rien non plus à la servilité mécanique des médias francophones, qui se contentent le plus souvent de (mal) traduire les accusations les plus échevelées de leurs collègues faussaires d’outre-Atlantique.

PS — Au moins, les responsables du bobard de CNN ont-ils démissionné. De quand datent les dernières fake news du Monde — et de quand la démission d'un journaliste pincé en flagrant délit de désinformation?