Frédéric Vitoux, de l’Académie française, est l’auteur — entre autres — de Bébert ou le chat de Céline (Grasset) et d’un récent Dictionnaire amoureux des chats. Dans un somptueux entretien accordé à PHILITT, l’écrivain félinophile évoque cette présence vitale et mystérieuse dans l’environnement et l’œuvre de nombreux poètes. A commencer par Baudelaire, bien entendu.
«PHILITT: Le chat est-il le compagnon idéal de l’écrivain? Comment expliquer la fascination de cet animal pour le papier et les bureaux?
Frédéric Vitoux: Cette double nature du chat a été très bien mise en lumière par Baudelaire dans son poème sur les chats: «les amoureux fervents et les savants austères…» Il y a une intimité très forte entre les écrivains et les chats qui sont leurs compagnons silencieux. Quand Marcel Proust dit «les livres sont les produits de la solitude et les enfants du silence», il a raison. Le chat respecte précisément cette solitude et ce silence. Il vient, il monte sur la table, il vous regarde, il ronronne et laisse l’écrivain écrire, même si, parfois, il vous vole votre stylo, marche sur votre clavier ou s’allonge sur votre feuille de papier. Il est dans une sorte de recueillement zen. En outre, le chat est face à l’écrivain comme un vertige de l’inconnu et du secret. Le chat, contrairement au chien, n’est pas un animal domestique. Le chien dit de l’homme: «Il me nourrit, il me caresse, donc il est un Dieu.» Le chat dit de l’homme: «Il me nourrit, il me caresse, donc je suis un Dieu.» Le chat est un appel extraordinaire à l’imagination, au mystère, au vertige.»
«L'embuscade. Sirmium, 11.12.2016. (Photobiographie © Slobodan Despot)