Cinq hebdomadaires français : L’Obs, Le Point, Elle, Paris-Match, Point de Vue. Cinq fois, en couverture, le portrait de Simone Veil. L’alignement est tel que Le Point et Elle ont mis exactement la même photographie!

Il n’y a pas plus de variété en ce qui concerne les titres, puisque feu Simone Veil est une «héroïne» à la fois pour Elle et pour Paris-Match, «une conscience» pour L’Obs, tandis que pour Point de Vue, l’hebdomadaire en gilet rayé et livrée, c’est tout simplement «Madame».

On en vient à se demander s’il y eut autant de dithyrambes pour Napoléon, Foch ou de Gaulle à leur mort, pour ne pas parler de Descartes, de Pascal ou de Pasteur. On voit mal quelles sont les grandes découvertes scientifiques dues à la défunte, quelles sont les vastes provinces qu’elle a conquises ou conservées ou quelles sont les œuvres littéraires qui lui ont assuré l’immortalité. Pour la presse de 2017, Simone Veil a un titre de gloire qui l’emporte sur tous les autres: le «droit à l’avortement», devenu de fait une valeur centrale de l’Europe de Bruxelles.

Pourtant, c’était bien Simone Veil qui avait dit: «Personne n'a jamais contesté, et le ministre de la Santé moins que quiconque, que l'avortement soit un échec quand il n'est pas un drame».

Force est donc de constater que cet unanimisme digne d’une sous-république soviétique n’a pour objet que la promotion d’une Simone Veil revue et corrigée en 2017, et non de la Simone Veil réelle qui a fait voter en 1974 une loi dont il ne reste plus rien, et où on aurait bien de la peine à trouver la trace d’un «droit à l’avortement». Voici une femme transformée en palimpseste, et glorifiée en tant que telle.

Un spécialiste de la désinformation analyserait sans doute ce panégyrique sous l’angle de la stratégie de la sidération. A un tel degré de conformisme, on peut légitimement se demander si tous ces journaux ne pourraient pas être remplacés par un seul. La soviétisation serait ainsi parachevée.